Comment traverser les sombres temps

Ou Hannah Arendt, la comédie musicale

Du 5 au 26 juillet – 15h10

Relâches les jeudis 10, 17 et 24

« Les gens m’en veulent parce que je suis encore capable de rire et fort. Mais je sais une chose, je rirai probablement encore 3 minutes avant ma mort. »

C’est ce que disait Hannah Arendt, grande politologue et philosophe, celle-là même qui avait été persécutée par les nazis et avait réchappé de justesse à la mort.
C’est dans ses écrits et dans les récits de vie de la constellation qu’elle forme avec trois autres grands penseurs de son époque qu’Audrey Vernon vient puiser la force vitale dont nous avons besoin pour affronter notre actualité, chaque jour plus sombre et plus préoccupante. Résolue à ne pas céder à l’apathie et la torpeur engendrées par la peur, Audrey manie la plume comme une arme et convoque dans son spectacle, avec une intelligence fulgurante, les figures de notre monde contemporains et tisse un récit qui marie avec brio Diam’s à Gunther Anders, Jul à Tolstoï et Chantal Goya à Bertold Brecht.

Note de l’autrice

La montée du fascisme m’intéressait. J’avais envie d’écrire sur le racisme, la banlieue, les inégalités. Je trouvais que faire le biopic de la chanteuse Diam’s était une bonne porte d’entrée pour aborder ces thématiques.
En octobre 2023, les évènements du 7 octobre et le début de la destruction de Gaza m’ont arrêtée net.
Comment appeler notre époque?

Je n’arrivais plus ni à vivre, ni à écrire, ni à penser. Je me suis donc réfugiée dans la littérature et surtout dans les écrits et la vie d’Hannah Arendt, la théoricienne politique et autrice de « Amor mundi ». Je me suis « emmitouflée de lectures » comme le dit Walter Benjamin, son ami perdu dans le vacarme des années 40. J’ai cherché l’illumination qu’elle évoque dans « men in dark times » portraits de ses proches, Brecht, Benjamin… qui ont traversé, vécu et agi dans une des périodes les plus sombres que l’Allemagne ait dû traverser au 20ème siècle. Parcourir leurs œuvres et le récit de leurs vies m’a donné un mode d’emploi de l’attitude à adopter dans de telles périodes. Au fur et à mesure que l’année et l’écriture avançaient, j’ai approfondi ma compréhension de notre époque et la lumière, la joie sont revenues à travers des yeux qui ont pleuré.

J’ai décidé alors de laisser de côté mon projet sur Diam’s pour faire d’Arendt la nouvelle héroïne du spectacle. L’écriture porte aussi la trace de la genèse et des accidents de parcours. Une écriture interrompue sans cesse reprise au gré de l’actualité, portée par la poésie et la présence-absence du poète palestinien Ziiad Medhouk pour qui je devais jouer mais qui a décidé de ne pas quitter sa ville de Gaza bombardée. Entre une garde à vue, un festival écolo et des travaux de décoration, j’ai essayé de raconter mon journal de pensées entre les bras d’Hannah. Soutenue par l’ange Walter Benjamin, grande découverte et miracle de l’écriture de ce spectacle. Ce projet est un seul-en-scène poétique et politique.

J’ai confié la mise en forme, en jeu à Gurshad Shaheman, auteur et comédien que j’admire depuis longtemps. Travailler avec Gurshad, sur ce projet était un rêve. Nous étions élèves ensemble au conservatoire de Toulon et depuis je suivais avec passion son travail sur notre époque. Le dialogue que nous avons entamé a nourri, soutenu et porté ce projet.